CONSULTATIONS : JEAN-MARC KABUND, L’OISEAU DES AUGURES ?

Les consultations présidentielles se sont clôturées mercredi 25 novembre. Pendant trois semaines, le Palais de la nation a vibré au rythme trépidant d’un ballet de délégations et personnalités de tous acabits, certains se faisant même consulter plus d’une fois sous plus d’une casquette mais pour dérouler la même antienne. Des positions qui, au regard de la dynamique sous-jacente, seront certainement comptabilisées autant de fois qu’elles ont été émises dans un exercice d’arithmétique désormais exempt de toute illusion.

Le dernier jour des consultations, prolongées deux fois pour les besoins de la cause, aura été symptomatique de cet exercice qui semble avoir démarré par le résultat pour repasser par un habillage de l’opération – drôle d’algèbre. Pour cette ultime journée de tous les enjeux, il s’agissait, à tout prix, de ramener dans la nasse les « gros poissons » qui devaient apporter la caution déterminante de légitimation politique de ces consultations. N’est-ce pas qu’il s’agissait de monter une « union sacrée de la nation ?

Pour ce faire, la communication présidentielle et le secrétariat technique des consultations auront usé de stratagèmes qui, à la limite, ne visaient qu’à poser les repères indiquant tout au moins que ces gros poissons étaient arrivés jusque sous les parvis du Palais. D’où cette ultime invitation adressée « aux regroupements membres du FCC » ou cette annonce, accompagnée de commentaires, de Peter Kazadi sur la présence du PPRD qui en aurait fait la demande.

Cependant, personne ne fut dupe de ce manège, sachant que le PPRD est la pièce maitresse du FCC dont on connaissait déjà la position. Et la suite, dans la même journée, fut connue.

Le soldat Kabund, l’oiseau des augures

Mais le dispositif stratégique des consultations avait son ultime joker à abattre dans ce jeu de poker : le soldat Kabund. Certes, l’Udps avait le total contrôle des consultations, dans organisation, son déroulement et le résultat final en passant par la communication. Abraham Lwakabwanga, Directeur de la presse présidentielle, a révélé aux Congolais qu’il était le chargé de communication de l’Udps en détachement à la présidence de la République.

Sorti parmi les tout derniers « consultés », Jean-Marc Kabund avait la lourde charge de dire le « so what », le fin mot de l’affaire. N’est-ce pas lui qui arracha à Félix Tshisekedi son retrait de l’accord de Genève en lui lançant un ultimatum de 48 heures ? Désormais dépositaire de la volonté de la base, ce fameux « peuple d’abord », Kabund devint aussi la voix du maître jusqu’à décrocher le poste de Président a.i du parti – poste inexistant dans les statuts de l’Udps – juste pour le conserver jusqu’au retour du détenteur. Exit tout congrès électif conformément aux statuts du parti.

Par rapport aux consultations politiques du chef de l’Etat, Jean-Marc kabund se pose comme cet oiseau des augures qui annonce ce qui va arriver. A Kikwit déjà, il annonce qu’il n’y aura plus de coalition. Hier mercredi au sortir de son entrevue avec le chef de l’Etat, il fait la même annonce en se voulant plus précis et en allant plus loin : il n’y aura ni cohabitation ni coalition,  et le chef de l’Etat va opérer un changement radical de la gouvernance du pays.

Très sûr de lui, Kabund ne se donne même pas la peine de s’attarder sur le point de vue de son parti qu’il aurait transmis au Président de la République. Sa posture est plutôt à un compte-rendu, bref une synthèse de toutes les positions soumises, desquelles il tire donc cette conclusion : ni coalition ni cohabitation, changement radical de gouvernance. Et le streaming de son propos, organisé par les soins de ses équipes dans les réseaux sociaux, dit tout de l’objectif poursuivi.

Si, à ce jour, le chef de l’Etat, qui avait annoncé qu’il n’exclura aucun cas de figure, n’a pas encore parlé, il faut voir combien son parti politique et ses collaborateurs à la présidence ont travaillé l’opinion pour la préparer à cette fin : sorties médiatiques fracassantes, diabolisation de l’accord et des partenaires à la coalition, matinées politiques, marches, meetings, etc. Une débauche d’offensive visant l’ultime objectif, à savoir que « ce que dira le chef de l’Etat comme décision finale est la réponse à la volonté du peuple ».

Tshisekedi sur le sentier de la concentration/confiscation de tous les pouvoirs ?

Et dans cette démarche, on ne voit point de place pour des considérations quant aux limites et aux exigences constitutionnelles et légales. Même les tentatives des bons offices, comme celle de la Cenco, sont frappées d’anathème et on s’interroge sur ce que Tshisekedi fera de toutes les suggestions lui faites par les différentes délégations diplomatiques qu’il a reçues – ou qu’il a consultées par des émissaires interposées en Afrique – avant son discours de fin octobre dernier et pendant ses consultations.

Dans ces conditions, devrait-on s’attendre à ce que le chef de l’Etat, au nom de « son » union sacrée de la nation, fonce comme une boule de bowling dans un jeu de quilles ? Avec toutes les conséquences qui pourraient en découler ?

Les heures qui suivent nous en diront le fin mot. En attendant, l’opinion aura noté que rien, dans la posture de ses collaborateurs les plus proches, ne laisse de place à la moindre conciliation autour de la vraie problématique à la base de la crise et dans l’objectif de sublimation de l’intérêt général. Tout, par contre, concourt à l’élargissement et au renforcement de ses pouvoirs en lui octroyant  « tous » les leviers de l’appareil étatique.

Wait and see…

Jonas Eugène Kota

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